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Immunothérapies contre les tumeurs au cerveau

L’objectif à long terme est clair : un traitement contre le glioblastome, la forme de tumeur cérébrale la plus mortelle. Mais la voie est longue et tortueuse. Elle fait des boucles et utilise des ressemblances surprenantes entre l’être humain et le chien.

Johannes vom Berg et sa collaboratrice Barbara Zimmermann à l'Institut pour l'étude des animaux de laboratoire de l'Université de Zurich

Il faut beaucoup de patience et de persévérance. Au laboratoire de l’Institut d’animaux de laboratoire de l’Université de Zurich, une étude se penche sur des cellules qui communiquent entre elles et qui, pour le profane, semblent parfaitement identiques. Les scientifiques à l’ouvrage scrutent leurs microscopes, mais ne perdent pas de vue leur objectif : « Dans notre travail, nous avons toujours à l’esprit les patientes et patients », affirme Johannes vom Berg, neuro-immunologue.
 

Suppression de la réaction immunitaire

Avec son équipe, il recherche de nouvelles possibilités de traitement du glioblastome, la forme de tumeur cérébrale la plus fréquente et la plus agressive, à laquelle, à ce jour, la médecine n’a hélas toujours pas trouvé de réponse adéquate. De grands espoirs se fondaient sur les immunothérapies, des traitements qui ne sont pas dirigés directement contre les cellules cancéreuses, mais visent à renforcer les défenses immunitaires de l’organisme et à les orienter vers la lutte contre les cellules cancéreuses. Le fait que ces espoirs aient été jusqu’à présent déçus dans le cas du glioblastome est dû entre autres au fait qu’une « suppression de la réaction immunitaire antitumorale se produit dans le cerveau », explique le chercheur.

Ses travaux soutenus par la Recherche suisse contre le cancer (cf. encadré) se concentrent sur une molécule appelée interleukine 12 ou IL-12. L’IL-12 stimule les cellules immunitaires inactives et joue un rôle décisif dans la défense contre les agents pathogènes dits intracellulaires, comme par exemple les virus. « Si l’IL-12 fait défaut, une infection causée par ce type d’agent pathogène devient incontrôlable », dit Johannes vom Berg.
 

Causer une inflammation

Les cellules infectées ont surtout un point commun avec les cellules cancéreuses : « Le système immunitaire doit les éliminer le plus vite possible », explique le chercheur. De premières investigations sur des modèles murins ont montré que l’IL-12 est effectivement capable de causer une inflammation dans une tumeur cérébrale, déclenchant ainsi l’élimination souhaitée des cellules cancéreuses, la réaction qui est supprimée en l’absence d’IL-12.

Dans les années 1990, ces résultats prometteurs ouvrirent la voie à de premiers essais cliniques utilisant cette molécule. Mais il fallut les interrompre prématurément en raison d’effets secondaires graves qui entraînèrent même le décès de deux patients. Dans ces premiers essais, on injectait l’IL-12 par voie intraveineuse, d’où des réactions inflammatoires dans l’ensemble de l’organisme.

Johannes vom Berg et son équipe veulent en revanche limiter l’effet de la molécule à l’environnement de la tumeur. Ils l’ont donc modifiée « pour qu’elle reste dans le cerveau et soit dégradée rapidement en cas de passage dans le sang », écrit-il dans le rapport final de son projet achevé récemment.
 

Soigner les chiens atteints d’un cancer

Lui et ses collègues ont fait breveter leur nouvelle IL-12 optimisée pour le traitement du glioblastome. Mais avant d’administrer pour la première fois leur molécule modifiée à des êtres humains dans le cadre d’un essai clinique, ils doivent d’abord la tester sur des animaux. Pour une fois, il ne s’agit ni de souris, ni de rats : au moyen de cette substance, l’équipe de recherche essaye de soigner des chiens atteints d’un cancer. « C’est très satisfaisant », dit Johannes vom Berg.

« Le meilleur ami de l’homme peut atteindre un âge avancé », poursuit-il, et comme nous, avec l’âge, lui aussi a un risque accru de contracter un cancer. Par leur étude sur des chiens atteints de tumeurs cérébrales, Johannes vom Berg et son équipe veulent faire d’une pierre deux coups : ouvrir la voie à une éventuelle option de traitement chez le chien et « permettre un pronostic de l’efficacité chez l’être humain », détaille le chercheur.
 

Plans contrecarrés

L’étude de médecine vétérinaire aurait dû se faire en Grande-Bretagne, mais le Brexit et plus tard, le coronavirus, ont contrecarré ces plans. L’équipe de recherche ne s’est cependant pas laissé décourager et a tout d’abord poursuivi ses travaux dans une autre direction : les scientifiques ont employé leur temps à vérifier lesquels des sept médicaments d’immunothérapie autorisés pour le traitement du cancer chez l’être humain agissent aussi chez le chien. En fait, étonnamment, l’un de ces inhibiteurs de point de contrôle stimule aussi les cellules immunitaires du chien.

« Nous avons ainsi identifié un médicament qui convient pour un traitement combiné avec notre IL-12 modifiée », explique Johannes vom Berg. Ces deux dernières années, il a créé une entreprise spin-off et a pris contact avec des personnes de l’hôpital vétérinaire de Zurich ainsi qu’avec des chercheuses et chercheurs d’Italie, d’Espagne et des États-Unis pour poursuivre le développement d’immunothérapies contre les tumeurs cérébrales, aussi bien chez le chien que chez l’homme.

 

Numéro de projet : KFS-4146-02-2017

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